Pour la 6ème année consécutive, l’École nationale supérieure d’ingénieurs de Caen (ENSICAEN) et l’Université de Caen Normandie ont proposé à leurs étudiants de relever un défi original et unique : développer des applications informatiques fonctionnelles autour d’un thème donné en une semaine chrono.
Cette édition 2016, préparée en collaboration avec Le Dôme, Normandie aménagement et Le Pavillon, était consacrée au thème de l’espace public et de la smartcity. Objectif pour la centaine d’étudiants participants : imaginer comment le numérique et les nouvelles technologies peuvent faciliter le fonctionnement de la nouvelle ville d’Épron, un territoire de 60 hectares en plein renouvellement au coeur de l’agglomération caennaise. Une approche très concrète et un enjeu supplémentaire comme le souligne François Millet, LivingLab manager du Dôme : "Le sujet de ce nouveau marathon créatif oblige les jeunes à sortir de leur zone de confort. Il ne s'agit plus seulement de répondre à une commande et de créer une application numérique. Ils vont devoir sortir de leur métier de développeur informatique pour redevenir de simples citoyens et ainsi imaginer de nouveaux usages numériques pour la ville et ses habitants".
Pour cette édition, les étudiants en communication et graphisme de l'Ecole Brassart et du BTS design d'espace du Lycée Laplace de Caen se sont associés à l'évènement pour accompagner les élèves ingénieurs à s'approprier le sujet et ses enjeux mais également dans la mise en forme et la valorisation de leurs idées.
Co-construire l'espace public
L'ENSICAEN et Le Dôme ont proposé aux participants de débuter cette semaine créative par une rencontre avec des professionnels de l'aménagement et de l'urbanisme afin de mieux comprendre la thématique qui leur était soumise.
Ophélie Deyrolle, Responsable du développement territorial à Normandie aménagement, a ainsi présenté le métier d'aménageur et son évolution : "Nous devons aujourd'hui changer notre façon de penser l'aménagement. Les territoires sont vivants. Il y a un véritable enjeu dans notre capacité à co-construire avec celles et ceux qui vivent ces espaces publics".
Son collègue, Joriss Ludmann, Chargé d'opérations, a évoqué plus en détails le projet de développement de "L'Orée du Golf", un quartier mixte de 60 hectares destiné à part égale à l'habitat (1 200 logements) et au développement économique. Xavier Dosseur, Maire-adjoint de la Ville d'Épron en charge des travaux, de la sécurité et des bâtiments, est intervenu pour expliquer les problématiques rencontrées dans une ville et comment les nouvelles technologies pouvaient aider à y répondre : "Pour nous, l'information est au coeur de la notion de smartcity : notre capacité à fournir une information qualifiée aux habitants bien sûr mais aussi celle de n'importe quel citoyen à nous en faire remonter pour nous permettre de gérer l'espace public plus efficacement".
Ces interventions ont été complétées par Benoît Garnier, Architecte-urbaniste de l'agence Magnum Architectes (Nantes), qui est revenu sur la méthodologie à suivre pour penser l'aménagement d'un nouvel espace public.
De la problématique au concept
Au terme de ces présentations, les étudiants de l'ENSICAEN et de l'Université de Caen Normandie ont constitués 10 groupes de travail pour lancer le travail créatif.
Après une après-midi de réflexion autour des thématiques sur la smartcity proposée par Normandie aménagement (individualiser l'espace public, enrichir l'espace public par les comportements individuels, rendre l'espace public ludique et développer les fonctions du mobilier urbain), chaque groupe de travail a présenté les ébauches du concept qui serait développé pendant les 4 jours à venir.
Du concept au produit
Les 100 participants ont eu 3 jours pour pour répondre au défi lancé par Normandie aménagement : imaginer de nouveaux usages SmartCity et développer des solutions numériques pour la nouvelle ville d'Epron.
Tout au long de ces 72 heures, les étudiants ont pu bénéficier des équipements de la MRI et notamment de son FabLab. Ils ont ainsi pu découvrir les possibilités offertes par les machines à commande numérique de l'atelier (imprimantes 3D, découpes laser ou vinyle, fraiseuses, …) pour donner vie à leurs projets comme, par exemple, la réalisation des maquettes des nouveaux mobiliers urbains ou le prototypage d'un plan de ville.
Les jeunes ont également été accompagnés par les professionnels présents (enseignants, architectes, aménageurs, élus, médiateurs culturels et chargés de communication) pour affiner leur concept, développer et valoriser leur produit. Une présentation d'étape à mi-parcours a notamment permis d'aider les quelques projets en difficulté et d'encourager par quelques conseils les étudiants.
10 projets pour Épron
Lundi 11 janvier, l'ensemble des encadrants et des participants se sont retrouvés à la MRI pour faire le bilan de ce marathon créatif de 5 jours (5 000 heures de travail cumulé) et partager publiquement leur vision de la SmartCity. "Une aventure qui a mis les jeunes étudiants sous pression et les a obligé à sortir, pour le pire et le meilleur, de leur zone de confort" comme l'a indiqué Joan Reynaud, Coordinateur de l'évènement pour l'ENSICAEN.
Tour à tour, les étudiants se sont succédés sur la scène pour présenter au public et au jury de professionnels les 10 projets imaginés pour les espaces publics de la nouvelle ville d'Épron :
- Spot : la place ludique
Pour rendre l'espace public plus ludique, "Spot" propose de remettre le jeu au coeur de la ville grâce à un ensemble de mobiliers urbains constitué d'un damier numérique et de tables tactiles. Le damier, contrôlé par une borne et composé de 100 dalles lumineuses interactives recouvertes de plexiglas, constitue un véritable plateau de jeu géant de 25 mètres carrés où enfants et adultes peuvent se retrouver autour de parties de morpions, de marelles ou de memory. Les tables se transforment selon l'envie en jeu d'échec ou de dames. Le dispositif est complété d'une application mobile permettant aux joueurs de suivre leur progression, de se mesurer aux autres participants et de programmer des parties. - Abrico'
Ce deuxième projet revisite le concept de l'office de tourisme en transformant chaque abribus en borne d'information. Grâce aux 3 écrans répartis sur le mobilier, habitants et touristes peuvent être découvrir l'histoire de la ville, les sites d'intérêt et les évènements à proximité. Ils peuvent également transmettre des informations aux services de la ville ou aux autres usagers des transports en commun. - D.A.N.I. : la ville à votre image
Dans un espace en perpétuel évolution, D.A.N.I. (Dessin artistique, numérique et interactif) invite les habitants à collaborer autour d'une oeuvre visuelle. À l'aide d'une borne équipée d'une tablette installée stratégiquement dans l'espace public, les passants peuvent venir dessiner ou uploader une photo de la ville. La banque d'images collaborative ainsi constituée est ensuite diffusée sur des murs d'image installés sur les bâtiments pour mettre en avant le dynamisme de la ville et la créativité de ses habitants. - O'rizon, en ligne avec demain
Comment individualiser l'espace public ? Pour répondre à cette question, le quatrième groupe a remixé le banc public pour créer "O'Rizon", un réseau d'espaces de détente connectés installés dans le futur parc d'Épron. Ouverte ou fermée, équipé d'enceintes bluetooth, de lumières programmables et de capteurs de tous genres, ces bulles permettent de s'isoler dans une ambiance personnalisée pour s'offrir un moment particulier. - AbrEbus : stop and share
Alors que les abribus pourraient s'imaginer comme des lieux conviviaux, ces espaces publics sont remplis de personnes rivées sur l'écran de leur smartphone. C'est en partant de ce constat qu'est né le concept "AbrEbus", une nouvelle génération d'abribus qui invite les usagers des transports en commun à faire ensemble pendant qu'ils attendent leur bus. Jeu en réseau, oeuvre commune, débat public, … un nouveau lieu de rencontre et de discussion est né dans la ville. - Ludigma : une ville, des découvertes
Véritable chasse au trésor 2.0, le projet "Ludigma" propose de découvrir la ville en s'amusant grâce à un réseau de bornes interactives installées à proximité des sites d'intérêt de la ville. Grâce à une application mobile, les habitants et les touristes sont amener à se promener dans Épron à la recherche des bornes. Un QR Code permet d'accéder sur son smartphone à des énigmes en lien avec le site. Selon les souhaits de la municipalité, plusieurs thématiques peuvent être créées pour présenter l'histoire de la ville, ses personnages célèbres, les fonctions de la mairie et les bâtiments publics, … - Watt the park : le parc au courant
Les villes tiennent aujourd'hui un rôle essentiel dans l'éducation de leurs habitants (développement durable, économie d'énergie, alimentation et santé). Le septième groupe de cette semaine intensive a donc imaginé "Watt the park", une nouvelle génération de parc public où chaque activité physique permettrait de générer de l'électricité pour rendre l'espace public autonome en énergie, voire plus : un parcours dallé pour les marcheurs et les cyclistes, des espaces de jeux pour les enfants ou encore des appareils d'exercices pour les sportifs. Une nouvelle fois, une application mobile permettrait à chaque habitant d'estimer sa contribution et ainsi de prendre conscience de l'importance des petits gestes du quotidien en matière d'environnement. - Touch : une table pour vous changer les idées
Des bancs, une table, le dispositif "Touch" réinvente le kiosque public comme un espace de rencontre dans la ville où chacun, seul ou en petit groupe, peut se retrouver pour s'informer et s'amuser. - Le square
Comme l'a souligné Xavier Dosseur lors de la journée d'ouverture, l'échange d'informations est au coeur des problématiques de la SmartCity. Les élèves ingénieurs et étudiants du neuvième groupe se sont saisis de cet enjeu pour inventer "Le Square", un nouveau lieu public associant environnement et technologie pour proposer un espace de détente et d'échanges entre la ville et les habitants (informations municipales) mais aussi entre les habitants eux-mêmes (petites annonces). - Biocité : des jardins dans la ville
Le concept "Biocité" repose sur un ensemble de murs végétaux équipés de capteurs permettant de transmettre au service municipal des espaces verts, aux écoles ou à une communauté de jardiniers publics, des informations sur les plantes. Un site Internet permet de suivre la floraison des plantes ou la maturation des légumes et fournit des ressources pédagogiques sur les différentes variétés de végétaux. Le numérique devient ainsi un outil de gestion collaborative des espaces verts et de sensibilisation à l'environnement.
Au terme des présentations, le jury a désigné "Watt the park : le parc au courant" comme le gagnant de cette semaine intensive 2016. Ce projet et les neuf autres vont maintenant être mis à disposition de Normandie aménagement.

"Ces projets vont connaître une suite" a affirmé Franck Guéguéniat, Maire d'Épron, qui a souligné la qualité du travail effectué par les étudiants de l'ENSICAEN et de l'Université de Caen Normandie : "Un défi complexe, une concentration de talents et d'innovation, un travail exceptionnel qui donne un exemple vivant du numérique et oriente l'avenir d'Épron".