Après une première édition réussie en 2015, LADAPT Normandie et Le Dôme se sont de nouveau associés à l'occasion de la Semaine pour l'emploi des personnes handicapées (SEEPH) pour organiser les 22 et 23 novembre 2016 un nouvel atelier dédié à la question du handicap et des nouvelles technologies. Objectif de ce rendez-vous : prototyper 6 dispositifs techniques et numériques susceptibles de développer l'autonomie des personnes handicapées.
UN AN DE CRÉATIVITÉ
Voilà un an, quasiment jour pour jour, que Le Dôme et LADAPT Normandie développent un partenariat sur l'apport des technologies numériques pour les personnes en situation de handicap. "Notre premier évènement commun s'est déroulé le 18 novembre 2015 à l'occasion de la Semaine européenne de l'emploi pour les personnes handicapées" explique Jean-Louis Dubois, administrateur de LADAPT Normandie. "Ce premier atelier créatif nous a donné l'occasion de découvrir les démarches d'innovation ouverte et de recherche participative qui y sont à l'oeuvre."
À cette occasion, plus de 50 personnes issues des domaines de la recherche, des entreprises et personnels d’accompagnement ont travaillé à faire émerger plusieurs idées et scénarios d’usages de nouveaux dispositifs d'accompagnement de personnes en situation de handicap. Un évènement couronné de succès reproduit en octobre 2016 à l'occasion de la première édition du festival "Living Labs".
"Jusqu'ici, nous étions dans la co-création. Notre réflexion s'arrêtait au développement de concepts et de scénarios d'usage. Cette fois-ci, nous avons souhaité aller plus loin et inviter les participants à donner corps à toutes ces idées." — François Millet, LivingLab manager.
Pour leur troisième collaboration, les deux partenaires ont souhaité pousser la démarche. "Jusqu'ici, nous étions dans la co-création. Notre réflexion s'arrêtait au développement de concepts et de scénarios d'usage" indique François Millet, LivingLab manager du Dôme. "Cette fois-ci, nous avons souhaité aller plus loin et invité les participants à donner corps à toutes ces idées".
DU CONCEPT AU PROTOTYPE
Pour ce nouvel atelier de co-prototypage, LADAPT Normandie et Le Dôme ont donc retenus 6 projets parmi un ensemble de propositions nées des deux précédents rendez-vous pour les soumettre à la créativité et au savoir-faire des participants :- Un dispositif permettant d'allumer son smartphone par la voix. Une fois le téléphone portable allumé, beaucoup d'activités et interactions deviennent possibles. Mais pour une personne à la mobilité extrêmement réduite, cette première étape demeure compliquée.
- Un système de traduction automatisée en langue des signes (LSF). La langue des signes peut être assimilée à une langue maternelle pour la grande majorité des personnes sourdes ou malentendantes de naissance qui maîtrisent peu ou mal la langue française. Ce manque de pratique de l'écriture et de la lecture représente une difficulté quotidienne pour ces personnes, notamment face aux institutions qui communiquent souvent par courrier.
- Un outil permettant de ramener à soi des objets. Pour les personnes dont la mobilité est réduite de façon temporaire ou permanente, saisir et ramener à soi un objet peut représenter une véritable difficulté. S'il existe déjà des modèles de pince, reste le problème de ramener vers l'usager l'objet saisi.
- Un dispositif de détection des objets du quotidien. Retrouver ses clés de voiture ou de maison est un problème pour n'importe qui. Un défi du quotidien encore plus grand pour les personnes souffrant d'un déficit visuel. L'idée est ici d'équiper une paire de lunettes, équipement le plus courant chez les personnes malvoyantes, d'un système de détection.
- Un lecteur d'affichage digital. Lave-linge ou vaisselle, four et cafetière, ... Les appareils électroménagers sont de plus en plus dotés d'affichages digitaux et lumineux qui rendent leur utilisation extrêmement complexe pour les malvoyants.
- Un testeur de piles. Tout comme pour les écrans digitaux, les affichages "simples" par couleur, comme c'est le cas pour les testeurs de piles, ne sont pas adapté aux personnes aveugles ou malvoyantes.
JOUR 1 :
AFFINER LES IDÉES, TROUVER LES SOLUTIONS
Première étape : se confronter au réel. Avant de se lancer dans la réalisation des dispositifs, les participants doivent s'interroger, avec l'aide des facilitateurs, sur la faisabilité technique du projet : "Qu'est-ce qu'on peut faire nous, ici, maintenant" résume Matthieu Debar, FabLab manager du Dôme. Par groupe, ils sont donc invités à répondre à plusieurs questions simples mais centrales : Comment ça marche ? À quoi et à qui ça sert ? Est-ce que cette idée n'a pas déjà été développé ? Les futurs usagers en ont-ils réellement besoin ?
"Décrire un mouvement, définir la taille, le poids d'un dispositif ou le matériau dans lequel il sera réalisé permet d'affiner, de réorienter voire de rejeter un scénario qui paraissait prometteur" souligne François Millet.
C'est ce qui est arrivé à 3 des projets soumis aux participants. Une recherche a, par exemple, permis de découvrir que des dispositifs de contrôle de smartphone par la voix existaient déjà. Les lunettes détectrices d'objets n'ont quant à elles pas résisté au test d'usage (les personnes malvoyantes et aveugles présentes ont indiqué que l'un de leurs premiers réflexes étaient d'enlever leurs lunettes en arrivant chez eux) poussant les participants à imaginer un autre dispositif. Pour ce qui est du testeur de piles, la solution technique choisie s'est révélée être la même que pour le lecteur d'affichage digital.
Au final, 4 projets ont passé cette phase :
- LSFlash/AudioFlash : traduire l'écrit en langues des signes
Un QRCode apposé sur un courrier, une affiche ou un cartel permet à l'usager de renvoyer vers une traduction filmée en langue des signes (LSF) grâce à une application spécifique. Une solution technique qui peut également être adapté pour les personnes malvoyantes. Dans ce cas, un QRCode imprimé en 3D renvoie vers une audio-description du document ou de l'oeuvre. - Télescopince Cobra : ramener à soi un objet
L'idée est ici d'améliorer le système de pinces à long manche disponible sur le marché. La solution technique retenue est double. D'un côté, une pince à préhension universelle électrisée. De l'autre, un bras capable de s'enrouler sur lui-même. - JabberCat : détecter les objets du quotidien
Le groupe projet a choisi de partir sur un couplage entre une puce/boîtier fixé sur l'objet et une application embarquée sur un smartphone. Pour cette expérimentation, 10 objets du quotidien ont été sélectionnés : téléphone sans fil, lecteur MP3, torchons de cuisine, télécommande, clés, médicaments, carte d'identité, canne, boîte de conserve et… le chat ! - Colorux : détecter les couleurs
Sur la même logique que le Colorino, le dispositif se présente sous la forme d'un crayon capable d'identifier les couleurs grâce à un détecteur optique couplé à une synthèse vocale. Pour aller plus loin, le groupe s'est donné pour objectif que leur objet soit entièrement réalisable au sein d'un FabLab pour moins de 30 euros.
JOUR 2 :
DONNER CORPS AUX IDÉES, DOCUMENTER
Aujourd'hui, place au prototypage. Une nouvelle phase qui illustre la complémentarité entre LivingLab et FabLab. "Au-delà de la génération de nouvelle idées, les démarches d'innovation ouverte incluent également la réalisation et l'expérimentation de prototypes" explique Sylvain Garnavault, médiateur numérique au Dôme. "Cette phase serait impossible sans les outils de outils de prototypage rapide disponibles dans l'atelier de fabrication numérique". 
Pendant toute la journée, les participants, personnes en situation de handicap comprises, se sont impliqués dans la fabrication des prototypes et l'utilisation des outils, découpe laser en tête. "Dans le FabLab, nous ne faisons jamais à la place des personnes" précise Matthieu Debar, FabLab manager. "Nous les accompagnons, nous les formons à l'usage des logiciels et des machines pour qu'elles puissent se dire : je peux le faire !". Un objectif dans la parfaite continuité du concept d'empowerment [processus qui vise à permettre aux individus d’avoir plus de pouvoir d’action et de décision, plus d’influence sur leur vie, ndlr] défendu par LADAPT.
"Dans le FabLab, nous ne faisons jamais à la place des personnes. Nous les accompagnons, nous les formons à l'usage des logiciels et des machines pour qu'elles puissent se dire : je peux le faire !" — Matthieu Debar, FabLab manager.
À la fin de l'atelier, chaque équipe projet avait relevé le défi en présentant leur prototype fonctionnel au public des États généraux du handicap [voir encadré] organisés en parallèle par le CCAS de la Ville de Caen

Les fiches de présentation des 4 projets développés sont dès à présent disponibles sur la plateforme technique du FabLab du Dôme : LSFlash/AudioFlash, Télescopince Cobra, JabberCat et Colorux. Avis aux usagers, designers, entrepreneurs et autres makers de s'en saisir pour poursuivre leur développement !
L'IDÉE EN +
En parallèle de l'atelier, une nouvelle piste autour du moulage d'une poignée de fauteuil adaptée à la main de polyhandicapés est apparue. Un besoin réel. Une idée qui pourrait être prochainement explorée grâce au scanner 3D en cours de développement au Dôme.ÉTATS GÉNÉRAUX DU HANDICAP
En parallèle de l'atelier "Prototypage, handicap et technologies", le CCAS de la Ville de Caen organisait au Dôme la 8ème édition des États généraux du handicap qui avait cette année pour thème "Le numérique au service du handicap". Objectif de ce rendez-vous : valoriser les nombreuses possibilités offertes par ces nouvelles technologies.Matthieu Debar et François Millet, respectivement FabLab et LivingLab managers, ont été invités à présenter en plénière les travaux réalisés par les participants de l'atelier et, plus largement, les démarches d'innovation ouverte et de recherche participative menées au sein du bâtiment. Céline Martineau, Chargée de projets au sein de l’association "Les Atomes crochus" et du groupe "Traces" est également intervenue pour présenter le projet "E-Fabrik" qui associe des jeunes et des personnes en situation de handicap pour imaginer et produire une solution concrète à un problème du quotidien en utilisant les lieux de fabrication numérique de leur territoire.